Presse : "A cheval sur l’acceptation des différences"


Presse : "A cheval sur l’acceptation des différences"

© Yoann HENRY, MAPS MAG / 2 juin 2012

L'article

A Kappelkinger se trouve un élevage de chevaux pas comme les autres. En totale harmonie avec la nature, la ferme des islandais de l’Albe a pour vocation de mettre l’équitation à la portée de tous, et plus particulièrement des enfants handicapés.

«Ce n’est pas parce qu’on est différent qu’on ne peut pas faire comme les autres ». Avec sa ferme équestre « Les islandais de l’Albe », Audrey Lallouette conjugue sa passion pour les chevaux avec l’accueil du jeune public handicapé.
Originaire de Kappelkinger, la jeune femme y a repris l’élevage de chevaux familial en 2005. Elle et son époux ont conçu eux-mêmes les installations de la ferme, sur un terrain de 28 hectares, route de Hilsprich. Ils s’occupent d’environ 70 chevaux, dont une vingtaine sont destinés à la monte.

Pour parvenir à son but, Audrey Lallouette a suivi une formation agricole, ainsi qu’une formation d’éducatrice spécialisée pour le handicap. Elle reçoit chaque semaine une centaine d’enfants handicapés, venus de centres spécialisés basés sur toute la Moselle-Est. « Ma grande philosophie, c’est l’acceptation de la différence. On est tous pareils ! Je dis toujours qu’il y a quelque chose de bon dans chaque cheval, et que c’est comme ça pour tout le monde », affirme-t-elle. Il y a 2 ans, un moniteur diplômé, Cyrille Bargeton, a été embauché pour ouvrir une école d’équitation. Cette école répond à un but bien précis : faire travailler dans les mêmes cours enfants handicapés et enfants « valides »

Chez « Les islandais de l’Albe », les équipements sont prévus pour que les jeunes handicapés se sentent chez eux. Ainsi, le manège est surbaissé. Toutes les installations sont de plain-pied. Une fosse a même été spécialement réalisée par permettre aux enfants de monter sur le dos des chevaux à hauteur du sol. En cas de besoin, un palan électrique permet de transférer une personne de son fauteuil roulant sur un cheval. Pour Audrey, « le but, c’est d’arriver à zéro chute, à la sécurité maximum ».

Il faut des mois de travail pour sensibiliser le cheval à la relation particulière qui doit s’établir entre la monture et les cavaliers. Pour arriver à ses fins, mais aussi par philosophie, la maîtresse des lieux laisse ses chevaux « faire leur vie entre eux » et « maintenir des relations sociales au sein du troupeau ». Etant ainsi aussi peu contraints que possible par les interventions humaines extérieures, ses pensionnaires ont, en quelque sorte, la « zen attitude ». « Ainsi, poursuit Audrey, quand ils reviennent vers l’homme, ils n’ont pas de tics, ils ne tapent pas du pied, ne secouent pas la tête… Ils sont beaucoup plus équilibrés dans leur tête dès lors qu’ils sont au travail. »
Il faut dire que les islandais sont une race tout particulièrement adaptée pour ce que souhaite Audrey. Le sang froid qui coule dans leurs veines les garde de réactions par trop épidermiques. Relativement petits (1,36 à 1,42m au garrot), ils sont des montures idéales pour le jeune public. Par ailleurs, là où la plupart des chevaux n’ont que trois allures (le pas, le trot, le galop), les islandais en ont deux autres dans leur panoplie : l’amble et le tölt. Le tölt est une course à quatre temps où le cheval garde toujours un pied au sol : il n’y pas de suspension, et cela est plus confortable pour le cavalier.

Les jeunes cavaliers, de leur côté, doivent également passer par une phase de préparation. « Avant de monter, les enfants apprennent ce qu’est un cheval, comment il fonctionne. Nous faisons tout un travail « à pied ». Une fois ces connaissances acquises, ils se sentent davantage sécurisés. La connaissance de l’animal est tout aussi importante que la connaissance de l’équitation en elle-même. »
Plus encore qu’une école d’équitation, « Les islandais de l’Albe » peuvent s’envisager comme une école globale, une école de la vie : « S’il y a des règles à respecter avec un cheval, c’est qu’il y a aussi des règles à respecter avec les gens », explique Audrey. Avant de préciser : « Ici, l’éducatrice ce n’est pas moi : c’est le cheval qui fait tout le boulot ! ».
Et quelle plus belle récompense que de voir les élèves progresser, se développer, et même pour certains participer à des concours équestres. Les enfants ont même droit à des joies dont ils ne soupçonnaient pas l’existence. Comme par exemple lorsque les moniteurs, mettant à profit la présence proche de nombreux plans d’eau ainsi que les qualités de nageurs des chevaux, les emmènent faire des baignades équestres… à moins qu’il ne s’agisse d’équitation aquatique !

Yoann HENRY